L’attente fut longue, presque insoutenable pour toute une génération de joueurs ayant usé leurs pouces sur les opus originaux . Après le succès retentissant et mérité de la compilation « Tony Hawk’s Pro Skater 1 + 2 » en 2020, les regards étaient inévitablement tournés vers l’avenir, vers la suite logique que tout le monde espérait sans oser y croire tout à fait. L’annonce de « Tony Hawk’s Pro Skater 3 + 4 » a donc agi comme une décharge électrique, une promesse de retrouver des sensations que l’on pensait à jamais enfouies dans nos mémoires d’adolescents. Cette promesse est enfin devenue une réalité tangible, débarquant sur nos consoles et PC avec la lourde tâche de satisfaire à la fois les puristes de la première heure et les nouveaux venus, curieux de comprendre l’aura qui entoure cette franchise légendaire. Le défi pour les développeurs d’Iron Galaxy, qui reprennent le flambeau de Vicarious Visions, était de taille : comment moderniser deux des épisodes les plus aimés de la série sans en trahir l’esprit ? Comment sublimer des mécaniques de jeu déjà quasi parfaites tout en y apportant une fraîcheur bienvenue ? La réponse se trouve dans ce test, les amis !

Scénario
Parler de « scénario » au sens traditionnel du terme pour un jeu « Tony Hawk’s Pro Skater » serait un exercice périlleux, voire contre-productif. En effet, la force de la série n’a jamais résidé dans une trame narrative complexe ou des dialogues à choix multiples, mais plutôt dans un concept simple, puissant et universel : la progression d’un skateur, de l’anonymat des parks locaux à la consécration mondiale. « Tony Hawk’s Pro Skater 3 + 4 » ne déroge pas à cette règle et l’embrasse avec une confiance renouvelée. Le mode Carrière, qui constitue le cœur de l’expérience solo, n’est pas une histoire que l’on nous raconte, mais une histoire que l’on vit, une toile de fond sur laquelle le joueur est invité à peindre ses propres exploits.
Vous débutez en tant que jeune prodige du skate, choisissant votre avatar parmi une galerie de légendes (Tony Hawk, Kareem Campbell, Elissa Steamer, etc.) ou en créant votre propre personnage de toutes pièces grâce à un éditeur ultra complet. Le but ? Parcourir le monde, de la Fonderie de « THPS 3 » aux rues animées de San Francisco dans « THPS 4 », pour accomplir une série d’objectifs qui mettront vos compétences à rude épreuve. C’est ici que la narration environnementale et contextuelle prend tout son sens. Chaque niveau est un chapitre, une nouvelle étape de votre voyage. Les objectifs, bien que variés, dessinent une trame cohérente : récolter les lettres S-K-A-T-E, trouver la cassette secrète, réaliser des scores spécifiques, effectuer des tricks impossibles sur des spots iconiques… Chaque tâche validée est une victoire, un pas de plus vers la reconnaissance de vos pairs. La grande différence structurelle entre les deux jeux originaux est ici brillamment conservée et unifiée. « Tony Hawk’s Pro Skater 3 » proposait une approche classique, avec des sessions chronométrées de deux minutes pour maximiser ses points et remplir un maximum d’objectifs. « Tony Hawk’s Pro Skater 4 », quant à lui, avait révolutionné la formule en introduisant des niveaux ouverts, sans limite de temps, où le joueur pouvait explorer à sa guise et activer les défis en parlant aux différents personnages non-joueurs (PNJ). La compilation ballaie le monde ouvert de « THPS 4 » en optant pour une approche plutôt rétrograde dans lequel il faudra accomplir les objectifs dans un temps limite, comme sur les trois précédents jeux. Un gros points noir pour les fans de la série qui esperaient vraiment que cet aspect qui avait fait la force du quatrième opus à l’époque, soit à nouveau de la partie. Les PNJ, qu’il s’agisse d’autres skateurs, de passants excentriques ou de figures d’autorité un peu simplettes, contribuent à donner vie à cet univers et à contextualiser vos exploits, souvent avec une bonne dose d’humour, marque de fabrique de la série.
Votre quête de gloire est également ponctuée par le déblocage de nouvelles planches, de tenues, et surtout, par l’amélioration des statistiques de votre skateur, matérialisant concrètement votre progression et votre maîtrise grandissante. En somme, le scénario de « Tony Hawk’s Pro Skater 3 + 4 » est une ode à la culture skate, un récit non-linéaire et émergent qui se construit à travers le gameplay, les défis et la personnalisation, plaçant le joueur comme unique auteur de sa propre légende.

Gameplay
Le gameplay a toujours été le roi incontesté de la franchise « Tony Hawk’s Pro Skater », un savant mélange d’accessibilité arcade et de profondeur technique qui a su séduire des millions de joueurs. La refonte de « Tony Hawk’s Pro Skater 1 + 2 » avait déjà placé la barre très haut, en unifiant les mécaniques des premiers opus tout en y intégrant des ajouts bienvenus comme le « revert », le « wall plant » ou le « spine transfer ». Le cœur du système reste inchangé : un bouton pour le grind, un pour le flip, un pour le grab et un pour l’ollie. C’est simple, intuitif, et en quelques minutes, n’importe quel joueur peut commencer à enchaîner des figures basiques. Mais là où la magie opère, c’est dans la complexité qui se cache derrière cette apparente simplicité. Le timing, la gestion de la vitesse, la connaissance des lignes et l’enchaînement des tricks sont autant de paramètres à maîtriser pour transformer une simple session en une symphonie de combos de plusieurs millions de points. La grande nouveauté de « THPS 3 » à l’époque, le « revert », qui permettait de lier des combos en half-pipe à des manuals au sol, est ici magnifié. Intégré de manière native et fluide, il devient l’outil indispensable pour prolonger des enchaînements qui semblaient jusqu’alors impossibles. Combiné au « manual », aux « lip tricks » et à une physique légèrement ajustée pour plus de réactivité, le système de combo atteint un niveau de richesse et de créativité sans précédent. Chaque rebord, chaque rampe, chaque élément du décor devient une opportunité. Le jeu nous pousse constamment à expérimenter, à chercher la ligne parfaite, celle qui nous permettra de traverser tout le niveau en un seul et unique combo dévastateur. C’est un dialogue permanent entre le joueur et l’environnement, une quête d’optimisation grisante et incroyablement addictive. La compilation brille également par sa capacité à unifier les expériences. Les niveaux de « THPS 3 », originellement conçus pour des sessions de deux minutes, s’ouvrent à l’exploration libre, révélant des secrets et des possibilités de combos insoupçonnés. Inversement, les vastes cartes ouvertes de « THPS 4 » peuvent désormais être jouées en mode chronométré, offrant un défi de scoring intense et renouvelé.
Les ajouts ne s’arrêtent pas là. De nouveaux tricks spéciaux ont été ajoutés pour chaque skateur, les contrôles en « switch » sont plus pertinents que jamais et le système de « spine transfer » entre deux rampes adossées, une des innovations majeures de « THPS 4 », a été peaufiné pour une fluidité exemplaire. Les modes de jeu annexes viennent compléter ce tableau idyllique. Le multijoueur en ligne, stable et complet, propose des classiques comme « Graffiti », « Trick Attack », mais aussi des jams plus libres où l’on peut simplement skater entre amis. Le mode « Créer un Park », hérité des opus précédents, a été considérablement enrichi avec de nouveaux objets, des options de personnalisation plus poussées et un partage en ligne facilité, promettant une durée de vie quasi infinie grâce à l’imagination de la communauté. En définitive, le gameplay de « Tony Hawk’s Pro Skater 3 + 4 » est un chef-d’œuvre. Il réussit l’exploit de rester fidèle à l’héritage tout en le modernisant avec brio. C’est un système exigeant mais juste, complexe mais intuitif, punitif mais incroyablement gratifiant. Chaque session est une leçon, chaque combo réussi une petite victoire. Iron Galaxy a compris que la force de la série ne résidait pas dans la simulation, mais dans la sensation, dans le plaisir pur et immédiat de la glisse et de la créativité. Mais est-ce que ca gameplay aux petits oignons arrive-t-il à faire passer la pilule de la suppression du monde ouvert de « THPS 4 » ? Pas sûr…
Petite ombre au tableau pour les joueurs PS5 : la pavé numérique ! En effet, beaucoup de joueurs de THPS ne tiennent pas la branche droite de la manette en l’agripant, mais en posant la main à la façon d’un clavier, afin d’avoir accès beaucoup plus rapidement aux touches et enchaîner les combos, malheureusement de cette façon on touche très facilement le pavé numérique, ce qui fait qu’on affiche un menu durant les combos ! C’est extrêmement frustrant de jouer avec la manette PS5, car il est impossible de désactiver le pavé numérique, mais on doit se forcer à adapter sa façon de jouer !

Graphismes
Lorsque l’on s’attaque à la refonte de titres aussi iconiques que « Tony Hawk’s Pro Skater 3 » et « 4 », la direction artistique et la refonte graphique sont des chantiers aussi importants que le gameplay lui-même. Il ne s’agit pas seulement de plaquer des textures en haute définition sur des modèles polygonaux vieillissants, mais de réinterpréter une vision, de redonner vie à des lieux qui ont marqué l’imaginaire de millions de joueurs. Sur ce point, « Tony Hawk’s Pro Skater 3 + 4 » réalise une performance éblouissante, surpassant même le travail déjà remarquable effectué sur la première compilation. Le jeu tourne sur une version améliorée de l’Unreal Engine, et cela se voit à chaque instant. Les modèles des personnages, qu’il s’agisse des skateurs professionnels ou de notre avatar personnalisé, sont d’un réalisme saisissant. Les visages sont expressifs, les animations d’une fluidité exemplaire et les tenues affichent des détails de textures (le grain du tissu, les reflets sur le cuir) qui ancrent les personnages dans le réel. Voir Tony Hawk, avec quelques années de plus mais toujours la même détermination dans le regard, s’élancer sur la méga-rampe est un spectacle à couper le souffle. Mais la véritable star de cette refonte, ce sont les niveaux. Chaque carte a été entièrement reconstruite à partir de zéro, avec un souci du détail qui force le respect. La Fonderie de « THPS 3 » n’a jamais paru aussi industrielle et menaçante, avec ses coulées de métal en fusion qui illuminent la scène d’une lueur orangée et ses machines qui grondent en arrière-plan. Le Canada, avec ses cabanes en bois et ses half-pipes enneigés, offre un contraste saisissant, baigné dans une lumière froide et cristalline.
Chaque lieu emblématique est transcendé. L’aéroport de Tokyo, avec ses néons colorés qui se reflètent sur le sol fraîchement poli, le zoo avec ses animaux animés en arrière-plan, ou encore l’île d’Alcatraz, lugubre et battue par les vents… tous ces environnements sont plus vivants et immersifs que jamais. Les développeurs ont ajouté une quantité phénoménale de détails qui n’existaient pas dans les versions originales : des graffitis plus nombreux et plus complexes, des PNJ qui vaquent à leurs occupations, des effets de particules (étincelles lors d’un grind, poussière qui s’échappe des roues) qui renforcent l’impact de chaque action. Les effets de lumière sont particulièrement réussis. Les ombres dynamiques s’étirent et se déforment en temps réel en fonction de la position du soleil ou des sources de lumière artificielle, donnant une profondeur et un relief inédits aux environnements. Les reflets sur les surfaces métalliques ou les flaques d’eau sont d’un réalisme bluffant et contribuent à l’immersion. Le tout tourne avec une fluidité à toute épreuve, maintenant un framerate constant même lorsque l’action et les effets visuels s’accumulent à l’écran, ce qui est essentiel pour un jeu qui demande une telle précision dans les commandes. La direction artistique a su trouver le parfait équilibre entre le réalisme des textures et des éclairages, et l’esthétique « arcade » et légèrement « cartoonesque » qui a toujours caractérisé la série. Le jeu est beau, très beau, mais il ne tombe jamais dans le piège du photoréalisme aseptisé. Il conserve cette âme, cette énergie « punk rock » qui fait son identité, avec des couleurs vives, des contrastes marqués et une présentation visuelle qui transpire la culture skate. « Tony Hawk’s Pro Skater 3 + 4 » est une véritable claque visuelle, un modèle de remake qui non seulement rend un vibrant hommage aux originaux, mais qui les sublime pour les présenter sous leur meilleur jour à une nouvelle génération.

Bande sonore
Si le gameplay est le cœur et les graphismes le visage de la série « Tony Hawk’s Pro Skater », alors la bande sonore en est sans conteste l’âme. Plus qu’une simple playlist accompagnant l’action, la musique a toujours été un élément central de l’expérience, définissant l’ambiance, rythmant les sessions et gravant des souvenirs indélébiles dans la mémoire des joueurs. Pour beaucoup, la découverte de groupes comme Goldfinger, Rage Against the Machine ou Millencolin est intrinsèquement liée aux heures passées à skater virtuellement. La bande-son de « Tony Hawk’s Pro Skater 3 + 4 » avait donc une pression monumentale sur les épaules : non seulement préserver cet héritage musical sacré, mais aussi le rafraîchir pour parler à une nouvelle audience. Le résultat est un triomphe absolu, un mix parfait de nostalgie et de découverte qui s’impose comme l’une des meilleures bandes-son de jeu vidéo de ces dernières années. Le premier coup de génie des développeurs a été de réussir à conserver la quasi-totalité des morceaux iconiques des deux jeux originaux. Dès les premières notes de « Ace of Spades » de Motörhead ou de « Blitzkrieg Bop » des Ramones dans « THPS 3 », ou encore de « TNT » d’AC/DC dans « THPS 4 », la nostalgie opère instantanément. Ces hymnes intemporels du rock, du punk et du metal n’ont pas pris une ride et leur énergie brute se marie toujours aussi parfaitement à la frénésie des combos. Retrouver ces classiques est un plaisir immense, un retour en terrain connu qui rassure et excite à la fois. Mais une simple compilation de vieux succès n’aurait pas suffi.
La véritable force de cette nouvelle bande-son réside dans sa sélection de nouveaux morceaux, qui viennent s’intégrer avec une cohérence remarquable aux côtés des classiques. Les choix sont éclectiques mais toujours pertinents, couvrant un large spectre de genres qui ont toujours gravité autour de la culture skate. On retrouve du punk rock moderne, du hip-hop old-school et contemporain, de l’indie rock et même quelques touches de hardcore et de ska. Des artistes comme IDLES, Run The Jewels, FIDLAR ou encore The Linda Lindas viennent apporter une énergie nouvelle, une fraîcheur qui prouve que l’esprit rebelle et créatif de la franchise est toujours bien vivant en 2025. Cette nouvelle sélection est si bien intégrée que l’on passe d’un classique de 2001 à un titre de 2024 sans jamais ressentir de rupture. L’ensemble forme un tout cohérent, une playlist ultime pour une session de skate.
Au-delà de la musique, l’environnement sonore global du jeu a bénéficié du même soin méticuleux. Le son de la planche sur les différentes surfaces est d’un réalisme saisissant : le cliquetis métallique d’un grind sur un rail, le bruit sourd des roues sur le béton, le craquement du bois lors d’un atterrissage un peu brutal… Chaque son renforce l’immersion et fournit des informations précieuses au joueur. Les ambiances des niveaux ont également été retravaillées. On entend le bruit de la foule dans les rues de San Francisco, le vent qui siffle sur les toits de Tokyo, les échos industriels de la Fonderie. Ces paysages sonores, combinés à la musique, créent une atmosphère incroyablement riche et vivante. Le jeu offre en outre une personnalisation complète de l’expérience audio, permettant de créer sa propre playlist à partir de la sélection disponible, d’ajuster le volume de la musique, des effets sonores et des voix, ou même de couper certains morceaux si le cœur nous en dit. En conclusion, la bande sonore de « Tony Hawk’s Pro Skater 3 + 4 » est bien plus qu’une simple collection de chansons. C’est une célébration de la musique et de son lien indéfectible avec la culture skate. Elle est à la fois une machine à remonter le temps et une fenêtre ouverte sur la scène musicale actuelle, un pont entre les générations qui unit les anciens et les nouveaux fans autour d’une même énergie. Un sans-faute ? Non, pas vraiment, on regrette beaucoup que les PNJ ou que les skaters jouable soient muets, on aurait vraiment adoré que les skater prètent leur voix pour cette compilation.

Conclusion
Malgré les points positifs à la pèle et la qualité objective du travail fait sur cette compilation, les fans seront sans contest déçu de l’abandone du monde ouvert du quatrième opus et le manque de doublages des skaters. Mais ces points noirs mis de côté, on ne peut que saluer la réussite de cette refonte qui propulse le jeu sur le trône des jeux de skate arcade. Un bon moment de nostalgie avec quelques ombres au tableau, en somme !
