L’amour. Jusqu’où iriez vous par amour? Jusqu’au bout? Jusqu’en enfer? Jusqu’au sacrifice? N’êtes vous pas nerveux face à l’inconnu? Iriez vous seul en terres hostiles? oui. Vraiment? Non vous ne devriez pas. Vous n’iriez pas. A moins que vous pensiez retrouver l’être aimé… Mais comment? Ecoutez moi. Senua est l’une de ces personnes. Senua n’est pas une guerrière. Senua est…. Elle. Mais sans lui. Qui? Dillion. Pour lui, elle défierait les dieux. Jusqu’au Ragnarök. La fin des temps. La fin de sa vie?
Ces voix?…Ces questions…Ces ordres…Ces conseils qui sonnent dans ma tête, à droite, à gauche…Je perds l’équilibre. Senua pagaie dans la brume. Suis-je dans sa tête…Qui sont ces voix de femmes? Qui est-elle? Senua! Elle est là par amour mais elle a peur. Elle s’est jetée tête baissée. Mais… Mais! Que fait-elle? Elle met pied à terre et repousse son bateau! Plus de retour possible.
C’est ainsi que démarre cette mystérieuse épopée, dans un amas de voix, de visions, de gros plans du visage tribal de Senua.
Rares sont les jeux ayant une telle puissance dans leur première heure, et cela va largement au delà de l’excitation de la découverte.
L’univers nordique dépeint ici est absolument maîtrisé, les architectures typiques en bois sculpté, les contes et mythologies vikings en passant par des soupçons d’inspiration tribale et vaudou dans les costumes et le bestiaire.
La première heure de HellBlade est des plus immersives et la proximité avec l’héroïne est incroyable, tant physiquement qu’auditivement et psychologiquement.
Nous voyons,entendons, nous pensons et vivons comme Senua à l’instant T. Et ceci, grâce à un son binaural travaillé, dont il faut obligatoirement profiter au casque, mais également par des effets visuels déstabilisants jouant sur les faux semblants ainsi qu’une proximité de la caméra qui pousse à l’immersion et à l’empathie.
Si pour les joueurs qui ont fait ICO, God Of War,Shadow of the Collossus, un gout de redite va se faire sentir dans la première moitié du jeu, c’est dans la seconde partie que le scénario régale de rebondissements épiques. A noter, il est de coutume d’informer sur la durée de vie, dans le cas d’Hellblade, ce sont huit magnifiques heures qui sont à vivre, avec un léger questionnement sur la septième heure qui semble n’être là que pour rallonger l’aventure et éviter le courroux des joueurs aux chronomètres.
Si je vante les mérites du coté expérience du jeu, son coté technique n’est pas en reste.
Visuellement, le jeu mise beaucoup sur son héroïne, son visage (spécialité de Ninja Theory) est troublant de vérité, les lumières sont extrêmement travaillées à chaque instant et les effets spéciaux plongent a contrario dans de furieuses et terrifiantes hallucinations. La mise en scène est dantesque! Tout est souvent propice à profiter du mode Photo complet pour les plus photographes d’entre vous (Les captures de ce test ont été effectuées avec ce mode)
L’animation, quant à elle, faite sur base de motion Capture et Expression Capture (visage) est forcément ultra réaliste et le jeu de l’actrice Melina Juergens (qui est à la base cadreuse/monteuse chez Ninja Theory) est surprenant de variation, de sensibilité. L’empathie est inévitable.
La mauvaise note est réservé aux textures des décors qui , même au maximum dans les réglages, se montrent trop souvent tels des bouillis de pixel. Vraiment dommage. Peut être est ce là pour permettre au jeu de rester fluide car il est bien optimisé, même sur de petites configurations PC, et le niveau moyen des graphismes bluffe toujours autant par leurs qualités citées plus haut.
Mais c’est un film ou un jeu? Si j’ai peu parlé du gameplay c’est parce qu’il est un outil au service de l’expérience d’immersion.
Point de tutoriel pour vous apprendre à vous battre. Senua n’est pas une guerrière, elle ne sait pas se battre au départ, vous non plus.
Aussi risqué que réussi, je vous laisse découvrir le système de combat (Les joueurs de beat them up ne seront pas dépaysés)
Malheureusement, le bestiaire est très limité. Au nombre de 4, les créatures sont forcément redondantes. De plus que ce soit de l’ennemi standard au berserk avec bouclier, leurs schémas de combat ne brillent pas par leur originalité mais par contre ils envoûtent et terrorisent par leur taille et leurs designs mi-oiseau mi-ombre mi-bête mi-humain.
Comptez trois boss puissants et cauchemardesques pour terminer le maigre tableau. La limitation du bestiaire rend donc les combats répétitifs et faciles.
Au point de se demander comme dans les BATMAN de RockSteady, si les combats ne sont rien de plus que des QTE déguisés.
Reste l’autre partie du gameplay, l’exploration, mélange de plateforme et d’énigmes. Alors que le premier se veut très simpliste, pas de saut, juste grimper un parapet ou une échelle. Les énigmes sont curieuses et intéressantes grâce à un système de mondes parallèles et de mirages, mais qui finissent par se ressembler beaucoup entre elles.
Le principe étant « relativement » simple, aligner des éléments avec votre regard pour créer certaines formes. Et ceci sera décliné à l’identique durant le jeu. La fameuse septième heure n’étant que ceci, je me demandais donc si ce n’était pas, comme je le disais, un remplissage pur et simple.
Hellblade, Senua’s sacrifice de Ninja Theory est LE jeu que l’équipe voulait développer à coté des grosses commandes comme DMC, Enslaved… Une création personnelle de six développeurs et créatifs, unique, puissante…très puissante! On ne peut fermer les yeux sur la grosse répétitivité du système de jeu que ce soit les énigmes ou les combats ou le bestiaire… Mais l’histoire et la mise en scène vous font complètement oublier cette lacune. Sept heures troublantes, touchantes, déchirantes, angoissantes plongé dans le corps et l’esprit d’une femme forte nommée Senua. Une montée trébuchante étrangement très réaliste au pays des dieux, au pays des croyances, au pays de l’inconscience. Si le courage vous prend, entreprenez avec Senua le voyage initiatique de sa vie, le voyage vidéo ludique de la votre.